Français | English
Les épreuves de la guerre civile

Les épreuves de la guerre civile


Homme et société



Que se passe-t-il lorsque, en situation de guerre civile, au cœur du familier, s'évanouit la familiarité ? Dans une maison pleine d’ennemis, en ce point zéro du politique où la discrimination entre l’ami et l’ennemi n’a plus nulle évidence ?

Cet ouvrage interdisciplinaire, en examinant plusieurs situations de guerre civile allant du XVIe siècle à nos jours, de la France à la Chine en passant par l’Algérie, entend ainsi interroger ce qu’il advient quand le voisin peut vous égorger, le boucher vous empoisonner, votre accent vous trahir, le fils dénoncer et la rue, naguère familière, se faire guet-apens : « Car en matière de guerres intestines, écrit Montaigne au XVIe siècle, votre valet peut être du parti que vous craignez. » Dans cet univers chaotique, l’espace, mais aussi la langue, les amis, les objets – le sens commun en un mot –, se dérobent, cessent d’être immédiatement appropriables, et nécessitent d’être constamment redéfinis. À l’inverse, le fonctionnement social en « période normale » se caractérise par un haut degré d’implicite. Une part essentielle des règles, des conduites à tenir, des préséances à respecter, des itinéraires à emprunter, le sens des mots, leur prononciation, les identités à reconnaître, tout cela va de soi ou, mieux, indiffère. Ce qu’il faut faire, ou dire, n’a, dans le cours ordinaire de l’existence, nul besoin d’être affiché, mais se joue le plus souvent en silence, dans les ajustements tacites que l’habitus ou le « sens commun » permettent d’opérer.

C’est ce sens commun ordinaire du cours des choses, qui n’est certes pas sans conflits, que la guerre civile, en déchirant le partage entre implicite et exigence d’explicitation, vient révéler dans sa profondeur. En ce sens, cet ouvrage propose non seulement un mode d’enquête sur l’expérience intime et sociale de la guerre civile, avec sa désagrégation et ses réajustements imposés, mais il offre aussi une réflexion sur la manière dont les ordres sociaux pénètrent et organisent la toile ordinaire des existences, autrement dit sur la manière dont le social fait corps, résiste, ou cède.

Préface de Patrick Boucheron et postface de Gilles Dorronsoro

Contributions de Michael J. Braddick, Thomas Chopard, Élisabeth Claverie, Quentin Deluermoz, Jérémie Ferrer-Bartomeu, Jérémie Foa, Laurent Gayer, Aïda Kanafani-Zahar, Nida Kirmani, Jean-Clément Martin, Tobie Meyer-Fong, Malika Rahal, Stellio Rolland, Mercedes Yusta Rodrigo et Sophie Wahnich.

Quentin Deluermoz

Quentin Deluermoz est professeur d'histoire contemporaine à l’Université Paris Cité et directeur du laboratoire de recherche ICT-Les Europes dans le monde (UR337). Ses recherches portent sur l’histoire sociale et anthropologique des ordres et des désordres au XIXe siècle (France, Europe, empires) ainsi que sur l’épistémologie des sciences sociales.


Quentin Deluermoz
Policiers dans la ville
La construction d'un ordre public à Paris (1854-1914)
Histoire de la France aux XIXe et XXe siècles n° 71


Collaborations intellectuelles ou scientifiques :

Quentin Deluermoz, Anthony Glinoer
Histoire de la France aux XIXe et XXe siècles